Les Alchimistes
Jean Beguin
1550 - 1620
Jean Béguin (1550-1620) est un apothicaire et chimiste français auteur de l'un des premiers livres de « chimie », ou du moins de la forme transitoire de l'alchimie qui allait devenir plus tard la science chimique. Le succès de l'ouvrage a participé à faire accepter quelques innovations majeures apportées par Paracelse à la thérapie et à l'analyse « chimique » des substances, sous la forme de « la résolution des mixtes en leur principes », préfigurant l'analyse chimique des substances.
Pour couper court aux éditions pirates de ses cours, il se décide à publier en 1610 une version courte de son enseignement sous le nom de Tyrocinium Chymicum7 « L'entraînement du chimiste », d'abord en latin en 1610, puis en français grâce à la traduction par Jean-Lucas de Roy sous le titre Les Elemens de chymie de Maistre Jean Béguin, reveus, expliquez et augmentez par Jean Lucas de Roy, 3e édition, Lyon, P. et C. Rigaud.
Jean Béguin connaissait bien les doctrines alchimiques de l'époque, puisqu'il avait publié en 1608 la première édition parisienne du célèbre traité alchimique, le Novum Lumen Chymicum de Sendovogius, alchimiste polonais à la cour de l'empereur de Prague.
Il fut aussi très influencé par le Alchemia du chimiste allemand Libarius dont il reprit des passages entiers dans son ouvrage11.
Les Éléments de chimie, 1615
L'ouvrage présente les techniques (al)chimiques des paracelsiens en se tenant à distance de la philosophie naturelle d'inspiration chrétienne de Paracelse. En se revendiquant au contraire d'Aristote et Galien, il tente une conciliation entre médecins humanistes galénistes et médecins paracelsiens. Là où Paracelse avec ses coups d'éclat, avait échoué, on peut considérer que Jean Béguin a réussi à faire accepter quelques innovations intéressantes de Paracelse.
On trouve dans cet ouvrage un des premiers emplois en français du terme « alcool » pour désigner le produit d'une distillation du vin :
- « Quand la poudre ou chaux est rendue impalpable, comme farine très subtile, ils [les Chymiques] l’appellent Alcool, duquel mot ils se servent aussi pour exprimer l’esprit-de-vin très subtil & plusieurs fois rectifié, lequel ils nomment Alcool de vin. » (Les éléments de chimie, 1620)
Cette nouvelle acception avait d'abord été introduite en allemand par Paracelse sous la forme de alkohol vini.
Dans le livre, il décrit la synthèse de l’acétone, qu’il appelle esprit ardent de Saturne et qu’il prépare par pyrolyse de l’acétate de plomb (ou sel de Saturne).
Pb(CH3COO)2 → PbO(s) + CO2(g) + (CH3)2CO
Que savait-on sur l'acétone en 1615?
La première synthèse de l'acétone fut réalisée en 1606 par Andreas Libavius à partir d'acétate de plomb (ci-dessous à partir du carbonate de calcium, via l'acétate de calcium)..
Il faut savoir que Robert Boyle, en 1661, en réalisa une autre synthèse à partir d'acide pyroligneux (pyro- : du latin pyre, chaleur, feu ; ligneux : du latin lignum, bois), nom donné aux condensats bruts produits lors de la pyrolyse du bois et plus particulièrement des feuillus. Il se compose de 80 à 90 % d'eau et de 10 à 20 % de composés organiques, dont notamment de l'acide acétique, du méthanol, de l'acétone, ainsi que des goudrons solubles et insolubles.